Mort de l’acteur français Alain Delon

Les trois enfants de l'acteur ont annoncé sa mort ce dimanche 18 août.

Alain Delon, monstre sacré du cinéma français à la beauté fracassante, est mort à l’âge de 88 ans, ont annoncé ce dimanche 18 août matin ses trois enfants dans un communiqué commun à l’AFP.

“Alain Fabien, Anouchka, Anthony, ainsi que (son chien) Loubo, ont l’immense chagrin d’annoncer le départ de leur père. Il s’est éteint sereinement dans sa maison de Douchy, entouré de ses trois enfants et des siens. (…) Sa famille vous prie de bien vouloir respecter son intimité, dans ce moment de deuil extrêmement douloureux”, indique le communiqué.

Très affaibli depuis un AVC en 2019, l’acteur vivait dans sa propriété de Douchy, alors que ses trois enfants, Anthony (59 ans), Anouchka (33 ans) et Alain-Fabien (29 ans), très divisés sur l’état de santé de leur père et la façon de s’en occuper au mieux se déchiraient dans les médias.

Alain Delon avait été célébré à Cannes, en 2019, où il avait reçu une Palme d’honneur, pour l’ensemble de sa carrière. “Ce soir c’est un peu un hommage posthume, mais de mon vivant”, avait lancé l’acteur, ému. “Je vais partir, mais je ne partirai pas sans vous remercier”.

“Je quitterai ce monde sans regrets”, avait-il déclaré dans une interview teintée d’amertume, accordée à Paris Match début 2018. Le monstre sacré du cinéma s’y plaignait de l’époque, de la solitude aussi, lui qui fut entouré des plus belles femmes.

La solitude, il la connaît depuis sa petite enfance. Né à Sceaux en 1935, le petit Alain n’a que quatre ans lorsque ses parents divorcent. Il est confié à une famille d’accueil, dont le père était gardien de prison. “Combien sont-ils à savoir que j’ai passé mon enfance en prison? Du moins dans la cour de la prison de Fresnes – mon père adoptif y était gardien -, où je jouais avec d’autres enfants de gardiens”, confiait-il à TV Mag en 2015.

De la charcuterie au festival de Cannes

Sa mère s’étant remariée à un boucher-charcutier, Paul Boulogne, le jeune Alain Delon passe un CAP de charcuterie. Mais à 17 ans, pour échapper à un destin qui l’emballe peu, il devance l’appel et fait son service militaire dans la marine. Impliqué dans un vol de matériel de l’armée, il doit choisir entre la prison et l’Indochine et se retrouve à Saïgon, jusqu’à la fin de la guerre d’Indochine.

“Le seul monde où j’étais vraiment très heureux, c’est quand j’étais militaire dans l’armée, confiait-il en 2016 à Léa Salamé dans Stupéfiant. J’y ai tout appris. Tout ce que je suis devenu, je le dois à l’armée”.

De retour en France, il vit de petits boulots, comme débardeur aux Halles. L’acteur Jean-Claude Brialy repère sa beauté et l’emmène au Festival de Cannes. C’est là qu’il reçoit ses premières propositions cinématographiques. Yves Allégret lui offre son tout premier rôle, en 1957 dans Quand la femme s’en mêle. La machine est lancée.

“Être acteur, c’est un accident”

Le cinéma est un heureux hasard pour celui qui n’avait aucune idée de ce que serait son avenir. “Je ne savais pas du tout ce que j’allais faire et j’étais ouvert à tout”, racontait-il en 1979, dans l’émission télévisée Les oiseaux de nuit. Il n’a d’ailleurs jamais appris la comédie et jamais suivi de cours ni fréquenté d’école, contrairement à ses contemporains Jean-Paul Belmondo, Jean Rochefort, ou encore Jean-Pierre Marielle qui se sont rencontrés au Conservatoire.

Il est pourtant un acteur-né dont la beauté magnétique irradie à l’écran et aimante les plus grands réalisateurs de l’époque. “C’est un acteur très animal, c’est un fauve même, dans le bon sens du terme. Il a une présence incroyable”, soulignait Bertrand Blier dans un documentaire intitulé Alain Delon: La naissance du mythe. Dans les années 1960, les films s’enchaînent, dont plusieurs chefs-d’œuvre.

Deux ans plus tard, il incarne le séduisant Tom Ripley dans Plein soleil de René Clément. Puis joue le jeune et innocent Rocco, face à Annie Girardot, Rocco et ses frères, de Luchino Visconti, la même année. Suivent L’éclipse, de Michelangelo Antonioni, avec Monica Vitti, Mélodie en sous-sol, de Henri Verneuil, avec Jean Gabin, une des ses idoles, Le guépard, encore avec Visconti.

“Le Samouraï, c’est moi!”

En 1958, il rencontre sur le tournage de Christine, une jeune actrice allemande, connue pour son rôle dans Sissi. C’est Romy Schneider, qui sera l’un des grands amours de sa vie.

Il joue aussi dans L’insoumis, d’Alain Cavalier, en 1964, et dans Les félins, de René Clément face à Jane Fonda en 1964. La même année il est La tulipe noire, le héros d’Alexandre Dumas dans le film de Christian-Jacque. En 1966, il incarne Jacques Chaban-Delmas dans Paris brûle-t-il?. Autant de films qui sont devenus des classiques et le font entrer dans la légende.

En 1963, il quitte Romy Schneider, pour une jeune photographe, Nathalie, qu’il épouse en 1964. Un an plus tard naît leur fils, Anthony. Malgré une relation passionnelle, Nathalie finit par quitter Alain Delon. Ils divorcent en 1968.

Coup de foudre professionnel

En 1967, il tourne son premier film avec Jean-Pierre Melville. Une rencontre marquante pour le cinéaste et pour l’acteur. Entre les deux hommes, c’est un véritable coup de foudre professionnel. Delon racontait, ainsi, dans un entretien au Figaro comment il avait reçu Melville chez lui, avenue de Messine, avec sa femme Nathalie.

“On s’assied. Il me dit: ‘J’ai un film que je veux absolument faire avec vous, personne d’autre. Ça s’appellera Le Samouraï.” Il commence à lire le scénario. Au bout d’un moment, je l’arrête: ‘J’accepte. Cela fait six ou sept minutes et mon personnage n’a toujours pas prononcé un mot. C’est moi! N’en parlons plus. Allons-y!”.

Ensemble ils tournent Le Samouraï, donc, puis le Cercle Rouge, avec Bourvil et Yves Montand, en 1970, et Un flic, en 1972, avec Catherine Deneuve. Des rôles de héros assez mutiques qui conviennent bien à Delon. L’acteur aux yeux bleu acier enchaîne les polars, avec Melville, mais aussi Henri Verneuil. Il retrouve le réalisateur de Mélodie en sous-sol pour Le clan des Siciliens en 1969, avec Jean Gabin et Lino Ventura.

Romy, Nathalie, Mireille…

Alain Delon retrouvera Romy Schneider en 1968, dans le film La Piscine de Jacques Deray. Le film scelle les retrouvailles d’un couple mythique, au sommet de sa beauté. Delon confiera plus tard que ce tournage est l’un de ses plus beaux souvenirs. “Mon plus beau souvenir, c’était l’été 1968. La maison à Saint-Tropez, la lumière y était magnifique. Romy… J’avais l’âge du Christ, 33 ans, l’âge idéal pour un homme”.

Il n’y a pourtant entre eux plus rien de sentimental. Romy Schneider partage la vie du metteur en scène allemand Harry Meyen et Alain Delon vient de rencontrer Mireille Darc, avec qui il vivra pendant quinze ans.

Jacques Deray, encore lui, signe la plus flamboyante rencontre entre Delon et son “rival” de toujours, Jean-Paul Belmondo. C’est Borsalino, en 1970, un film qui suscitera d’ailleurs une brouille entre les deux acteurs, amis dans la vie. Lorsque Belmondo découvre l’affiche du film, il est furieux. Il y a en effet marqué “Alain Delon présente: Alain Delon et Jean-Paul Belmondo dans Borsalino”, car Delon en était également le producteur. “Le contrat précisait bien qu’il n’y aurait pas deux fois le nom de Delon sur l’affiche”, raconte sur RMC Laurent Bourdon, auteur de Définitivement Belmondo. Fâché, Jean-Paul Belmondo refusera même d’assister à la première.

Rivalité absurde

Les deux héros, l’un populaire et sympathique, l’autre ténébreux et solitaire sont souvent comparés.

“Jean-Paul est mon ami. (…) J’ai tourné avec lui, j’ai vécu avec lui, j’ai vibré avec lui, j’ai pleuré et ri avec lui sur des plateaux de cinéma qu’on ne refera plus. Je l’aime et je l’admire, n’en déplaise à ceux qui nous ont opposés dans une rivalité ­absurde. Justement parce que nous sommes uniques dans notre genre, et incomparables, nous n’avons jamais été en concurrence. Ni dans nos vies de cinéma, ni dans nos vies privées”, écrivait Delon en 2006 dans Paris Match.

S’ils partagent l’affiche dans d’autres films (Les 101 nuits de Simon Cinéma, Les acteurs), il faudra attendre 1995 pour qu’ils apparaissent vraiment ensemble à l’écran, dans 1 chance sur 2, de Patrice Leconte, avec Vanessa Paradis. Le film, qui réunit les deux monstres sacrés, est un succès relatif.

En 1976, Alain Delon tourne un autre chef-d’œuvre, Mr Klein, de Joseph Losey. Il tâte aussi du cinéma américain avec L’assassinat de Trotsky, de Joseph Losey, en 1972, avec Richard Burton et Romy Schneider, ou Soleil rouge, un western avec Charles Bronson et Ursula Andress.

“Je n’ai jamais voté extrême-droite”

Dans les années 1980, Alain Delon enchaîne les rôles de super héros solitaires: super flic, super médecin ou des gangsters… presque jusqu’à la caricature. Il tourne dans Le toubib, Pour la peau d’un flic, Le battant (dont certains qu’il réalise lui-même). A la télévision, il incarne des flics encore, Fabio Montale, dans la série tirée de la trilogie marseillaise de Jean-Claude Izzo et Franck Riva, au côté de Mireille Darc.

En 1987, il rencontre Rosalie van Breemen, mannequin néerlandais. Deux enfants naîtront de leur union, Anouchka, en 1990 et Alain-Fabien, en 1994. Le couple se sépare en 2001.

Il a beaucoup été reproché à Delon, sa proximité avec Jean-Marie Le Pen, avec qui il entretient “une amitié de 50 ans”. “Je suis sympathisant de sa personne. Je n’ai jamais voté extrême-droite. Il y a des choses dans son programme qui me satisfont et d’autres non”, avait-il déclaré sur le plateau de France 3.

Sa venue au Festival de Cannes, en mai dernier, avait été entachée par une polémique. Des féministes reprochaient à l’acteur d’être “raciste, homophobe et misogyne”, selon les termes de l’association américaine Women and Hollywood, s’appuyant sur des propos qu’il a tenus par le passé. Une pétition demandant de “ne pas l’honorer”, avait recueilli plus de 25.000 signatures.

“Une vie extraordinaire”

En 1997 et 98, l’acteur devient malgré lui une “star” des Guignols de l’info sur Canal+. Maniant la troisième personne pour parler de lui (le fameux ‘il vous en prie’) , sa marionnette joue du côté immodeste d’Alain Delon. Une de ses dernières apparitions au cinéma, date de 2008. Il campait dans Astérix et les jeux olympiques, un Jules César plein d’autodérision. “J’ai eu une vie extraordinaire”, confiait-il en 2016 à Léa Salamé, expliquant alors qu’il n’avait pas peur de mourir.

Source- BFMTV

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